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05/02/2014

Daniel SUTRA (US Ramonville, DH féminine) : "S'ils n'aiment pas le foot féminin, qu'ils le disent !"

Après avoir débuté le foot du côté de Mondonville puis de Pibrac, avoir enrichi son bagage de joueur et d'éducateur en Nouvelle Zélande et en Guyane, Daniel Sutra est tombé dans le foot féminin par hasard. Depuis, il ne cesse de défendre ces filles à qui on reproche trop souvent d'être... des filles. A la tête de la DH de Ramonville et impliqué à cent pour cent dans le projet de formation du club, il jette un regard sans concession sur la situation du foot féminin dans le Toulousain et au delà. (par Frédéric Denat)

Daniel, avant de vous "spécialiser" dans le foot féminin, vous avez longtemps été avec les jeunes ou des seniors masculins. Pourquoi avoir basculé de la sorte ?
Par hasard. J'ai passé mon BE avec Manu Carvalho qui s'occupait à l'époque de la DH féminine de Saint-Simon. Lors d'un repas, un jour qu'il me faisait part des difficultés qu'ils rencontraient pour trouver des encadrants, je lui ai répondu que je ne comprenais pas pourquoi. Et que de mon côté, parce que la nouveauté et la découverte de nouveaux horizons m'ont toujours attiré, j'étais prêt à tenter l'expérience si l'occasion s'en présentait. Il a du en parler à ses dirigeants car, lorsqu'il a quitté Saint Simon, ils m'ont contacté et c'est comme ça que j'ai mis un pied dans le foot féminin.

Et vous y êtes toujours trois ans après, à Ramonville après un passage par l'ASPTT Albi. Est-ce à dire que vous vous y épanouissez ?
Oui, complètement. J'apprécie beaucoup le contexte dans lequel on évolue et la possibilité d'évolution importante qui est devant nous. Les mentalités ne sont pas les mêmes et, dans l'approche qu'elles ont du football, la plupart des filles sont sans ambiguité. Elles sont là par passion uniquement. Elles sont saines et, en plus, à l'écoute et attentives à leur progression. On ne peut pas en dire autant de pas mal de garçons. J'apprécie cette différence.

A quoi ressemble une de vos semaines type à Ramonville ?
Elle commence le dimanche soir après le match. Je visionne notre rencontre de l'après-midi. Le lundi dans la journée, j'appelle la capitaine de l'équipe pour faire un débrief, histoire d'avoir son ressenti depuis le terrain. Le lundi soir et le jeudi soir je prépare mes séances et le mercredi soir et le vendredi soir, je les anime. Le dimanche, on joue... et quand j'ai le temps je vais voir les autres équipes de la section.

 "En DH, il suffit d'une bonne gardienne et d'une bonne buteuse pour monter en D2... où ça devient insuffisant"
Après la D2, vous voilà en DH, avec quelles ambitions ?
Nous visons, à terme, les inter régions, d'ici deux ans, avec la volonté en parallèle de développer le projet de formation. Un travail très important est en train d'être fait au sein du club qui devrait, je l'espère, nous permettre de pouvoir durer dans le temps. Nous vivons une saison de transition avec la DH pour prendre le temps d'intégrer de nouveaux schémas et méthodes de travail qui n'existaient pas avant.

A part Rodez, les meilleures équipes de foot féminin de la région manquent cruellement de régularité au plus haut niveau. Pourquoi selon vous ?
Les raisons sont multiples mais elles concernent forcément le niveau des joueuses, pas suffisant pour prétendre mieux, et le manque d'argent à un moment où les clubs pros s'intéressent de plus en plus au foot féminin. Le fossé économique et sportif est énorme entre la DH et la D2, il l'est tout autant entre la D2 et la D1. En DH, il suffit d'une bonne gardienne et d'une bonne buteuse pour monter en D2... où ça devient insuffisant. Sainte-Christie en fait l'expérience cette saison. C'est aussi un problème de politique de club. A Saint-Simon, par exemple, le successeur de M. Del Tedesco, Frédéric Buigues, s'intéresse moins au foot féminin. A Ramonville, j'ai la chance d'avoir un président qui adhère mais si un jour un autre le remplace, il peut très bien changer de trajectoire. L'exemple de Muret est aussi malheureusement révélateur. L'ASPTT Albi est plus structuré avec un peu de budget et une volonté d'être solidaires avec les filles. Chaque club est un cas différent mais une des solutions est, aussi, de n'être qu'un club féminin.

Vous venez de récupérer quatre joueuses qui sont parties de Muret en cours de saison, est-ce que cela peut vous permettre de revoir vos ambitions à la hausse de cette saison ?
Non, on reste sur nos objectifs. De toute façon, nous ne pouvons en utiliser que deux à chaque match, car ce sont des mutées hors période. Et en plus, elles sont vraiment arrivées chez nous avec la tête au fond du sceau. Elles commencent à la sortir mais cet épisode a été difficile à vivre pour elles. Elles remontent la pente dans un environnement plus sain. Et contrairement à ce que peut dire le président de Muret, elles ne sont pas parties de gaité de coeur. Elles n'ont pas bataillé pendant toute une saison en D2 pour que ça finisse comme ça. Il faut arrêter de dire n'importe quoi.
 
"Mais quelles joueuses vont vouloir aller jouer à Muret après ce qui s'y est passé ?"
Justement, que vous inspire ce qui arrive à Muret, qui vient de perdre une quinzaine de joueuses en quelques semaines ?
C'est lamentable, à l'image de l'attitude de ce club qui a longtemps ignoré nos demandes de mutation concernant les quatre joueuses mutées qui attendaient leur qualification pour pouvoir jouer alors que nous avions pris la peine de bien les prévenir à l'avance. Le président de Muret a joué avec notre président, à Ramonville, et il n'a même pas eu le courage de l'appeler pour lui expliquer pourquoi ils faisaient traîner les choses. Il préfère appeler la police pour expulser des spectatrices, anciennes joueuses de son club, de Clément Ader alors qu'il n'en a même pas le droit. Mais quelles joueuses vont vouloir aller jouer à Muret après ce qui s'y est passé ? Les filles parlent entre elles c'est un petit milieu. Quel gâchis. Il serait vraiment dommage que par la faute de deux ou trois dirigeants cette belle section muretaine disparaisse. Je me demande à quel point cela ne les arrangerait pas que ça finisse ainsi. S'ils n'aiment pas le foot féminin qu'ils le disent, ce sera plus simple. Parfois, je crois aussi qu'il faut savoir dire qu'on s'est trompé. C'est aussi comme ça qu'on avance. En tout cas ce n'est pas avec ce type de comportement qu'on va faire évoluer la cause du foot féminin dans la région.

Vous êtes bien sévère !
Je veux juste rétablir la vérité. Chaque fois qu'on me parle de cette affaire, ça retombe sur les filles, c'est encore de la faute des filles, des filles soi-disant difficiles à gérer ! Mais c'est faux, archi-faux. Elles ont juste eu le tort de ne pas se laisser faire. Si, à Muret, elles avaient reçu la même considération que les garçons, elles y seraient encore. Sauf que tout le monde n'est pas encore prêt à leur faire la place qu'elles méritent. Elles jouent en D1, s'entraînent autant que les garçons, font autant de sacrifices, remplissent le stade aussi souvent voire plus... et au final elles coûtent toujours trop cher !

Etes-vous quand même optimiste pour l'avenir ?
Heureusement qu'il n'y a pas que des dirigeants qui veulent plus profiter que servir le foot féminin. Les mentalités changent petit à petit. Le nombre des licenciés ne cesse de diminuer pendant que celui des licenciées ne cesse d'augmenter.

Avec tout ça on s'est un peu éloigné de la notion d'éducateur, le thème de cette rubrique. On va donc terminer par la traditionnelle question. Selon vous, c'est quoi un bon éducateur ?
Un bon éducateur doit avant tout se remettre perpétuellement en questions, être à la recherche de tout ce qui peut lui permettre de s'améliorer et le mettre à profit pour ses joueuses. Il faut aussi être à l'écoute, tout en étant ferme, quitte à ce que ça "chauffe" un peu de temps en temps. Il doit aussi savoir s'adapter au public qui est face à lui car tout le monde ne recherche pas la même chose dans le football et tout le monde n'a pas les mêmes capacités.

Propos recueillis par F.D. Foot31
6291933-9488461.jpgDaniel Sutra n'a pas peur de s'engager en faveur d'une égalité hommes-femmes dans le football.
Daniel Sutra
Né le 17 juin 1979 à Clamart
Parcours
Joueur : Mondonville, Pibrac, Brax, ASPTT Toulouse, 3 Kings United (Nelle Zélande), ASPTT Toulouse
Educateur : Brax (jeunes et seniors), Blagnac, U15 (2002-2004), Cugnaux, U18 (2004-2005), ASPTT Toulouse, PL (2005-2008), Cosma de Saint Laurent Maroni, Guyane (2008-2009), ASPTT Toulouse, seniors(2009-2011), Saint Simon, D2 féminine (2011-2012), ASPTT Albi, D2 féminine (2012-2013), Ramonville, DH féminine (depuis 2013)
Diplôme : BE1
 

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